La confiture, entre art culinaire et science

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La confiture, entre art culinaire et science

La confiture est l’art de conserver, par le sucre, des fruits. On les fait cuire afin de les amener à un degré de déshydratation suffisant pour en assurer la conservation. Sans les pectines, présentes dans les parois cellulaires des fruits, les confitures ne pourraient pas prendre.

 

Des recherches sont menées à l’INRA
pour mieux comprendre le pouvoir gélifiant des pectines et maîtriser
les textures obtenues. Plus largement, l’analyse de la paroi des
cellules végétales peut ouvrir sur d’autres applications, industrielles
ou environnementales.

 

Les secrets d’une bonne confiture

L’association sucre, fruits, pectines
et acidité constitue le fondement d’une confiture traditionnelle.
Réussir une confiture, c’est conjuguer un savant équilibre entre ces
quatre paramètres et un temps de cuisson adapté au type de fruits
concernés.

 

La cuisson du mélange des fruits et du sucre
amène la préparation à un degré de déshydratation suffisant pour en
assurer la conservation. Dans le produit final, la teneur en sucre
total doit être égale ou supérieure à 60% pour permettre une bonne
prise des confitures dans les conditions habituelles de transformation
des fruits.

 

Quels fruits pour une bonne confiture ?

 
Pour un résultat optimal, il faut utiliser des fruits
mûrs et fraîchement récoltés. Les fruits trop mûrs ou légèrement
abîmés, mais aussi les fruits encore verts sont à éviter. Au cours de la
maturation des fruits, les pectines se transforment : elles passent du
stade de fibres fermes liées aux parois cellulaires à l’état de pectines
solubles et tendres, d’où le changement de consistance du fruit.

 

Avec
des fruits insuffisamment mûrs, le taux de pectines ne sera pas
suffisant et la confiture aura du mal à prendre. Avec des fruits trop
mûrs, l’acidité risque d’être trop faible pour que la pectine se
gélifie. L’astuce consiste alors à ajouter un jus de citron.

 

Le rôle des pectines expliqué par Marie-Christine Ralet *

Les pectines font partie des molécules
les plus utilisées par l’industrie agroalimentaire, notamment comme
épaississants pour les confitures et les gelées mais aussi comme
additifs. La structure chimique des pectines conditionne leurs
propriétés de gélification. Les chercheurs de l’INRA étudient les enzymes d’origine végétale ou microbienne permettant d’obtenir des textures de gel spécifiques.

 

Ces résultats seront utiles aux industriels pour produire, par exemple, des confitures de plus en plus allégées en sucre tout en conservant une texture satisfaisante. Les champs d’application de ces recherches INRA sont nombreux dans l’agroalimentaire : boissons lactées stabilisées grâce aux pectines, bases de fruits pour yaourts, additifs…

Les pectines indispensables à la confection de confitures

Les pectines sont de longues molécules composées d’un enchaînement de sucres
simples qui s’associent en un réseau. Quand les fruits sont chauffés et
éventuellement broyés, les pectines sont extraites des parois
végétales. Elles passent dans le liquide qui forme les confitures et
assurent leur prise.

 

Pour pouvoir s’associer les unes aux autres et constituer un réseau, les pectines ne doivent pas être noyées par les molécules d’eau. C’est pourquoi une quantité importante de sucre (60% au moins) est nécessaire pour réduire l’hydratation : le sucre va en effet pomper les molécules d’eau.

De l’acidité en plus…


Les pectines sont des molécules acides. Dans le cas d’un pH plus faible, c’est-à-dire acide, chaque molécule
de pectines se rapproche des autres pour former un réseau. Ainsi, dans
le cas de fruits doux (poire, raisin, mirabelle, etc.), un jus de
citron, ajouté en fin de cuisson, contribue à la prise des confitures en
favorisant l’association des pectines.

Tous les fruits contiennent-ils des pectines ?

Certains fruits,
naturellement riches en pectines comme la groseille, la pomme, le coing
et les agrumes, sont capables de gélifier tout seuls. La fraise, la
poire, la cerise ou la framboise sont au contraire des fruits qui en
contiennent peu. Il est alors possible d’ajouter des fruits ou des
extraits de fruits riches en pectines (la pomme, le coing) ou d’utiliser
des pectines isolées de matériels végétaux par l’industrie alimentaire
(marcs de pomme ou écorces d’agrumes).

 

Il existe également du sucre additionné de telles pectines ou sucre gélifiant. Lorsque les fruits sont très mûrs, les pectines peuvent être abîmées, rendant également nécessaire l’ajout de sucre gélifiant.

La fabrication des confitures allégées en sucre

Ces confitures
sont obtenues de façon radicalement différente des confitures
traditionnelles qui, elles, ne peuvent gélifier sans un apport de 60% de
sucre.
Pour réaliser une confiture allégée, les industriels utilisent des
pectines faiblement méthoxylées (pectines où moins de 50% des sucres portent un groupement méthanol).

 

Ces pectines LM (Low methoxyl) peuvent gélifier avec moins de sucre à condition d’ajouter un peu de calcium. Les confitures allégées ne contiennent au final que 25 à 30% de sucre mais se conservent moins bien après ouverture du pot.

Les autres applications des pectines dans le secteur agroalimentaire

Les pectines
sont également utilisées pour stabiliser les boissons lactées
fermentées populaires en Asie et au Moyen-Orient : le kéfir (Turquie),
le lassi (Inde), le doogh (Iran).

 

Les pectines ont ici un rôle de fluidifiant. Les molécules
de pectines (chargées négativement) forment une petite enveloppe autour
des protéines du lait (chargées positivement) et les empêchent de
s’agréger, permettant ainsi de fluidifier ces boissons.

 

Les débouchés dans le domaine environnemental

Les
formidables capacités d’association en réseau des pectines, mises à
profit dans les confitures, existent également dans les végétaux. Ainsi,
la paroi des cellules végétales, riche en pectines et en cellulose,
constitue un édifice complexe, première barrière aux agressions
extérieures (sécheresse, UV, attaques de pathogènes).

 

Les recherches menées par l’INRA
sur les pectines permettront donc de mieux comprendre les mécanismes de
défense naturelle des plantes et d’envisager potentiellement la
diminution des traitements phytosanitaires.

 

 

*
Marie-Christine Ralet, directrice de recherche à l’INRA, est la
spécialiste des pectines, polymères parmi les plus utilisés pour les
industries agroalimentaires. Elle coordonne un programme de formation
d’excellence de jeunes chercheurs européens sur l’analyse de la paroi
cellulaire des végétaux (programme Marie Curie « WallTraC »).


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