La sexualité en institution, qui ose en parler ?

La sexualité en institution, qui ose en parler ?

La sexualité des personnes hébergées en établissements est encore un sujet tabou, mais les nombreuses formations qui existent pour sensibiliser les soignants en démontrent l’importance. Les manifestations de la sexualité sont différentes entre elles. Elles vont du regard à l’acte sexuel le plus abouti.

 

Ces manifestations des personnes en institution (relation de couple hétérosexuelle ou homosexuelle, masturbation) posent souvent problème à leur entourage et au personnel soignant.
Or : « La sexualité et la tendresse peuvent contribuer, jusqu’à un âge
avancé, à satisfaire les besoins de contact physique, de complicité et
d’intimité. De plus, la sexualité peut être une précieuse source de bien-être physique et psychique ». (1)

 

Les personnes âgées ont-elles des besoins sexuels ?

Plusieurs études le démontrent : les besoins sexuels ne disparaissent pas au fil des ans. Ils diminuent en intensité ou en fréquence, mais peuvent s’exprimer à tout âge… même très avancé. La sexualité est une pulsion vitale. De plus, chez les personnes âgées, le contact avec la peau est très important. Toucher la main, caresser une personne âgée provoque chez elle une réaction de bien-être. Mais cela ne signifie pas toujours une relation sexuelle au sens d’un rapport sexuel.

Selon une étude (2) réalisée
sur 202 personnes âgées de 80 à 102 ans et dont l’âge moyen était de 86
ans : 82 % des hommes et 64 % des femmes avaient des rapports de
tendresse ; 72 % des hommes et 40 % femmes se masturbaient et 63 % des
hommes et 30 % des femmes avaient des rapports sexuels.

 

Par ailleurs, ce besoin relationnel fait entrevoir des phénomènes nouveaux. Compte tenu du nombre croissant de femmes seules vieillissantes, celles-ci osent afficher une relation sexuelle
entre elles, sans être à proprement parler des homosexuelles. Par
ailleurs, quelquefois des liens se tissent en dehors du couple quand un
des deux connaît des défaillances, par exemple lors d’une maladie de
type Alzheimer.

 

 

(1).
Gérard le Goués, Psychanalyste, Hôpital Rotchild, Paris : Le travail du
vieillir. In : Veysset Puijalin B, Savier L. Être vieux : de la
négation à l’échange. Éditions Autrement 1991, collection Mutations n°
124 : 146-152.

(2).
Etude de JG Bretschneider et NL McCoy, 1988 : Sexual interest and
behaviour in healthy 80- to 102-year-olds. Arch Sex Behav 1988 ; 17 :
109-129.

Sexualité des personnes âgées en institution
Conseils pratiques

Pourquoi la sexualité des personnes âgées est-elle difficile à comprendre ?

C’est d’abord une question culturelle. Beaucoup de croyances religieuses associent la sexualité à la reproduction. De plus, la sexualité de l’autre interroge toujours sur sa propre sexualité. Dans ce cas, c’est imaginer la sexualité de ses parents : c’est « insupportable ». Ensuite, on pense que les personnes âgées n’ont pas de désir, qu’elles sont dans l’incapacité de faire l’amour, qu’elles ne sont pas attirantes donc pas désirables. Enfin, d’aucuns pensent que le sexe chez les personnes âgées est honteux et pervers.

En ce qui concerne les institutions : les couples ne disposent que très rarement de chambres équipées de lits doubles. Ceci pour des raisons techniques ou médicales (les lits sont souvent des lits médicalisés), voire d’organisation ou de gestion des établissements (les chambres doubles sont plus difficiles à remplir…).

Bien
sûr, il n’est pas question ici de personnes âgées ayant des
comportements déviants sous l’influence des troubles mentaux (syndromes
démentiels, psychoses aiguës ou chroniques…). Mais, là encore, la déculpabilisation est nécessaire et le mode de prise en charge doit être adapté.

 

Est-ce que la sexualité est la même que chez les personnes jeunes ?

Chez tous les êtres humains il y a autant de sexualités,
de formes d’actes sexuels et de moyens d’atteindre le plaisir qu’il y a
d’individus. Tendresse, amour romantique, rapport sexuel… la frontière
est floue. Aujourd’hui, on admet plus facilement l’acte sexuel sans sentiment et inversement. La notion de plaisir ayant son origine dans le cerveau, il n’y a aucune raison qu’une personne vieillissante en soit privée.

 

Si
l’on admet que certains conservent les plaisirs de leurs sens (odorat,
goût, vue…) à un âge avancé, il n’y a aucune raison que le toucher en
soit exclu. D’ailleurs, aux deux extrêmes de la vie, c’est-à-dire chez
le nourrisson et la personne âgée, c’est le toucher qui s’avère le plus important.
C’est pourquoi les soignants expérimentés sont de moins en moins
choqués de la sexualité des personnes âgées. Une personne âgée est
d’abord une « Personne ». La priver d’un de ses plaisirs peut être aujourd’hui considéré comme de la maltraitance.

CATEGORIE : les-seniors